Loi Eckert : tout savoir sur la restitution des assurances-vie en déshérence

Il arrive que certaines personnes ignorent qu’elles sont bénéficiaires d’une assurance-vie contractée par un membre de la famille ou un proche à leur égard.

A leur mort, l’assurance-vie n’est donc pas réclamée à l’assureur qui n’a parfois même pas connaissance du décès de l’assuré.

L’assurance-vie tombe alors en déshérence, autrement dit dans l’oubli.

En 2013, la Cour des comptes estimait l’encourt des assurances-vie en déshérence à au moins 2,76 milliards d’euros.

Diverses lois sont intervenues pour remédier à cette situation dont la loi Eckert du 13 juin 2013.

Cette loi s’applique à tous les contrats d’assurance sur la vie, c’est-à-dire tous les contrats par lesquels, en contrepartie du versement de primes ou de cotisations, l’assureur s’engage à couvrir le risque de décès ou de survie en versant un capital ou une rente à la personne désignée comme bénéficiaire.

Il existe trois types de contrats d’assurance sur la vie : les assurances en cas de décès (les plus courants), les assurances en cas de survie (qui permettent de s’assurer une retraite) et les assurances couvrant les deux risques.

Cette loi s’applique aussi aux bons et contrats de capitalisation qui sont des placements à long terme qui permettent de capitaliser. Ils peuvent, comme les assurances-vie, être facilement oubliés et tomber en déshérence.

Depuis la loi Eckert, la recherche des contrats en déshérence s’est améliorée et toujours plus d’assurance-vie sont (re)découvertes par les assureurs.

Ils en informent alors les bénéficiaires.

Dès lors, une procédure de restitution des fonds débute et doit être close dans un délai d’un mois sous peine de sanction pour l’assureur. Le bénéficiaire peut aussi bien découvrir par lui-même l’existence d’un contrat en contactant soit l’AGIRA soit, depuis la loi Eckert, la Caisse des dépôts et des consignations.

Vous avez reçu un courrier vous annonçant que vous êtes bénéficiaire d’un contrat dont vous ignoriez l’existence. Pourquoi et comment obtenir la restitution des capitaux ?

La loi Eckert impose aux assureurs de comparer leur fichier client avec le répertoire national d’identification des personnes physiques (RNIPP) afin de rechercher les éventuels assurés décédés au moins une fois par an. Pour les aider dans cette recherche, la Fédération Française de l’Assurance (FFA) a créé l’association AGIRA. C’est elle qui compare les fichiers clients des assurés avec le RNIPP et ce depuis 2005.

Si une correspondance est trouvée, l’AGIRA en informe l’assureur. Ce dernier est alors tenu de rechercher les bénéficiaires de l’assurance-vie et de les informer de l’existence de cette assurance. Cette étape peut prendre du temps car les assurés sont parfois vagues dans l’identification du bénéficiaire. Ainsi, il n’est pas rare de rencontrer des contrats désignant comme bénéficiaire le « dernier petit-enfant » de l’assuré. C’est pourquoi il est d’ailleurs conseillé de bien rédiger son contrat d’assurance-vie en décrivant précisément le bénéficiaire (nom, prénom, adresse).

Dès lors que l’assureur a découvert l’identité du bénéficiaire, il doit le tenir informer et leur demander dans un délai de quinze jours l’ensemble des pièces nécessaires afin de procéder au paiement. Ce délai a été imposé par la loi Eckert en réaction aux manœuvres dilatoires utilisées par les assureurs afin de retarder le versement de la rente ou du capital, notamment en demandant des documents redondants. Pour contrecarrer cette pratique la loi prévoit maintenant que l’assureur demande l’ensemble des pièces nécessaires dans un seul courrier et qu’il ne peut pas formuler deux fois la même demande sur des pièces identiques ou redondantes (par exemple une carte d’identité puis un passeport).

Une fois que le bénéficiaire a transmis les pièces demandées, l’assureur dispose d’un mois pour verser le capital au bénéficiaire. Si, au-delà du délai imparti, le capital n’a toujours pas été versé, alors ce dernier produit de plein droit intérêt au double du taux légal durant deux mois, puis, après deux mois, le triple. Autrement dit le bénéficiaire s’enrichit du retard et l’assuré s’appauvri. Cette sanction a pour but d’inciter l’assureur à agir vite.

Si l’assureur ne respecte ses différentes obligations de recherche, d’information, de diligence ou allonge de façon anormale les différents délais, sa responsabilité civile peut être engagée en cas de préjudice. De la même façon, des sanctions administratives d’un montant de 40 millions d’euros peuvent être prononcées par l’Autorité du contrôle prudentiel et de résolution.

Le problème : le refus de verser le capital dû au bénéficiaire

Comme si le deuil n’était pas suffisant, la compagnie d’assurance a opposé une résistance manifestement déloyale à cette dame et jeune fille.

Comme trop souvent, la compagnie n’a pas hésité à profiter de l’ignorance de cette dame pour ralentir excessivement le processus de versement des sommes et générer des intérêts pour son propre compte sur ces avoirs qui ne lui appartenaient plus.

Comment procèdent les compagnies d’assurances ?

En pratique, elles sollicitent de façon systématique de nouveaux documents au motif qu’ils sont strictement nécessaires à l’étude de votre dossier y compris lorsque vous les avez déjà fournis.

En l’espèce, la compagnie avait même sollicité des pièces auxquelles elle savait que le bénéficiaire ne pouvait avoir accès, car elles étaient protégées par le secret de l’enquête qui était en cours auprès des forces de gendarmerie.

Plus encore, la compagnie avait formulé à plusieurs reprises des pièces dont elle était déjà en possession.

Surtout, ces pièces n’étaient pour la plupart absolument pas susceptibles d’avoir une incidence sur le versement du capital dû au bénéficiaire.

Les compagnies qui sont souvent des émanations juridiques de grands groupes bancaires profitent également de cette confusion pour vous opposer un intermédiaire supplémentaire (votre conseiller bancaire habituel) et ralentir ainsi le processus d’échange d’information.

De même, aucun numéro ni aucune adresse mail ne vous est communiqué, de sorte que si vous souhaitez vous adresser directement au gestionnaire de la compagnie, vous ne pourrez bien souvent le faire que par voie postale, ce qui ralentit également considérablement le processus.

Ce genre de situation peut conduire le bénéficiaire à temporiser ses démarches ou à abandonner toute revendication.

Pourtant cette attitude peut être lourde de conséquences, le délai prescription en droit des assurances étant de seulement deux ans.

Vous pensez être bénéficiaire d’un contrat mais vous n’avez pas été averti par l’assureur. Que faire ?

Lorsqu’une personne se pense bénéficiaire d’une assurance-vie mais qu’elle n’a pas été avertie de son existence après la mort de l’assuré, elle peut se renseigner elle-même auprès de différents organismes.

Si le décès de l’éventuel assuré remonte à moins de dix ans, l’assureur a toujours en sa possession le capital de l’assurance.

Pour s’assurer de l’existence de l’assurance-vie, il faut contacter l’AGIRA par courrier.

Si l’AGIRA découvre une assurance-vie, l’assureur a alors quinze jours pour transmettre au bénéficiaire l’ensemble des pièces nécessaires.

A la réception de celles-ci, l’assureur dispose d’un mois pour verser le capital.

Des sanctions s’appliquent en cas de non-respect de ces délais.

Si le décès remonte de l’éventuel assuré remonte à plus de dix ans, il y alors de fortes chances pour que le capital ait été transféré à la Caisse des dépôts et des consignations (C.D.C.).

En effet, la loi Eckert prévoit que dix ans après la prise de connaissance par l’assureur du décès de l’assuré, le capital est transmis à la C.D.C. si le bénéficiaire n’a toujours pas été identifié ou n’a toujours pas réclamé ce capital.

La C.D.C. n’effectuera aucune recherche du bénéficiaire.

C’est à ce dernier de se manifester et de chercher sur le site https://ciclade.caissedesdepots.fr/ l’existence d’une assurance-vie contractée à son égard. Si personne ne se manifeste vingt ans après que le capital ait été transmis à la C.D.C. alors l’argent de l’assurance-vie est acquise par l’Etat.

Si le décès de l’éventuel assuré remonte à plus de trente ans, il y alors de forte chance que le capital ait été acquis par l’Etat.

Il n’est alors plus possible de le réclamer.

Toutefois, si cette acquisition est la conséquence d’un manquement de la part de l’assureur dans sa recherche des bénéficiaires, alors sa responsabilité peut être engagée.

Attention, l’ensemble de ces délais se calcule, selon la loi Eckert, depuis le jour de la prise de connaissance du décès de l’assuré par l’assureur et non depuis la mort de l’assuré.

En cas de contrat d’assurance-vie à terme, le délai se calcule à partir du terme stipulé dans le contrat.

Article coécrit par Maxime DUBOIS – AVOCAT et Baptiste GARREAU – STAGIAIRE

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