La loi Badinter : un régime spécial d’indemnisation pour les victimes d’accidents de la circulation.

Si vous avez été victime d’un accident de la circulation impliquant un véhicule terrestre à moteur (VTAM), vous bénéficiez d’un régime spécial d’indemnisation prévu par la loi du 5 juillet 1985, dite « loi Badinter ».

La loi Badinter en quelques mots

La loi Badinter a été adoptée pour faciliter et accélérer l’indemnisation des victimes d’accidents de la circulation impliquant un véhicule terrestre à moteur (VTAM).

Avant cette loi, les victimes devaient engager une action en responsabilité civile contre le responsable ou son assureur, qui rendait leur indemnisation beaucoup trop aléatoire.

Avec la loi Badinter, les victimes non responsables bénéficient d’un régime d’indemnisation beaucoup plus performant.

Surtout, si le responsable de l’accident n’est pas assuré, n’est pas identifié ou si son assureur est insolvable, les victimes peuvent être indemnisées par le Fonds de garantie des assurances obligatoires (FGAO).

Ainsi, la loi Badinter permet aux victimes d’obtenir une réparation effective, plus rapide et plus juste de leur préjudice.

Voici ce qu’il faut savoir sur le champ d’application, les modalités et les limites de ce régime.

Quels sont les accidents concernés par la loi Badinter ?

La loi Badinter s’applique aux accidents de la circulation dans lesquels est impliqué un VTAM, c’est-à-dire tout véhicule automoteur, et circulant sur route par ses moyens propres, à l’exception des véhicules qui se déplacent sur rails. Par exemple, une voiture, un camion, un bus, un tracteur, une moto, un scooter, etc. (article L211-1 du Code des assurances)

L’accident doit être involontaire, non intentionnel ; il doit s’agir d’un événement fortuit, qui n’était pas prévu.

Il doit également s’agir d’un accident de la route, qu’il s’agisse d’une voie publique ou privée. La loi Badinter pourra donc par exemple être applicable à un accident impliquant un tracteur circulant sur un chemin agricole. Ou encore un accident impliquant une dameuse circulant sur une piste de ski.

Le VTAM doit être impliqué dans l’accident, c’est-à-dire qu’il doit avoir eu un rôle actif ou passif dans la réalisation du dommage. Il n’est pas nécessaire qu’il y ait un contact entre le VTAM et la victime ou entre deux VTAM. Il suffit qu’il y ait un lien de causalité entre le comportement du conducteur ou du gardien du VTAM et le dommage subi par la victime.

Si aucun véhicule terrestre à moteur n’est impliqué dans l’accident, par exemple un accident entre deux vélos ou encore un accident entre un vélo et un piéton, la loi Badinter ne pourra être appliquée. L’indemnisation des victimes sera régie par la responsabilité civile de droit commun.

Le dommage causé par l’accident doit être corporel, c’est-à-dire qu’il doit affecter l’intégrité physique ou psychique de la victime.

Qui peut bénéficier de l’indemnisation prévue par la loi Badinter ?

1. Les victimes non conductrices

Les victimes non conductrices sont les suivantes : piétons, cyclistes, passagers du VTAM ou des autres véhicules non motorisés …

La loi Badinter prévoit une indemnisation quasi automatique pour les victimes non conductrices du VTAM impliqué dans l’accident. Il s’agit des piétons, des cyclistes, des passagers du VTAM ou des autres véhicules non motorisés.

Ces victimes sont indemnisées intégralement de leur préjudice, sauf si elles ont commis une faute inexcusable ayant été la cause exclusive de l’accident. La faute inexcusable est une faute volontaire, d’une exceptionnelle gravité, exposant sans raison valable son auteur à un danger dont il aurait dû avoir conscience. Il est rarissime que le caractère inexcusable d’une faute soit reconnu par les Tribunaux contre une victime non conductrice.

2. Les victimes conductrices

Les victimes conductrices du VTAM impliqué dans l’accident ont le droit à l’indemnisation intégrale de leurs préjudices sous réserve que ne soit démontrée à leur encontre l’existence d’une faute de conduite ayant joué un rôle causal dans l’accident.

En d’autres termes, pour être indemnisée intégralement sous le régime de la loi Badinter, la victime conductrice ne doit pas être responsable (même partiellement) de l’accident.

Si la victime a commis une faute ayant participé à la réalisation de l’accident, son indemnisation sera diminuée à proportion de sa part de responsabilité dans l’accident.

Toutefois, si le conducteur est responsable de l’accident (partiellement ou totalement), il pourra éventuellement être indemnisé si son contrat d’assurance prévoit une garantie personnelle du conducteur.

Dans ce cas, il peut être indemnisé dans les limites fixées par son contrat.

 

Comment se déroule la procédure d’indemnisation prévue par la loi Badinter ?

La procédure d’indemnisation prévoit une offre obligatoire de l’assureur.

En effet, l’assureur du VTAM impliqué dans l’accident a l’obligation de présenter une offre d’indemnisation à la victime dans un délai de 8 mois à compter de l’accident ou, si la victime lui a adressé une demande d’indemnisation, dans un délai de 3 mois à compter de cette demande.

L’offre doit couvrir l’ensemble des éléments du préjudice subi par la victime, en tenant compte des prestations sociales et des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir par la victime.

Si la victime accepte l’offre, elle signe une transaction avec l’assureur, qui met fin au litige.

Nous rappelons à ce stade qu’il ne faut jamais signer une offre émise par un assureur sans avoir préalablement consulté un avocat praticien en dommage corporel. En effet, dans une écrasante majorité des cas, l’offre émise par l’assureur sera plus importante lorsqu’un avocat est mandaté par la victime.

Si la victime refuse l’offre ou si l’assureur ne respecte pas les délais, elle peut saisir le tribunal compétent pour solliciter son indemnisation.

La victime dispose d’un délai de 10 ans à compter de la consolidation de son état de santé pour agir en justice.

La loi Badinter prévoit également un mécanisme de provision, qui permet à la victime de percevoir une avance sur son indemnisation.

L’assureur doit verser une provision à la victime dans un délai de 3 mois à compter de sa demande d’indemnisation, sauf si le responsable n’est pas assuré ou n’est pas identifié.

La provision doit être suffisante pour couvrir les frais médicaux et les pertes de revenus de la victime.

Loi Badinter et indemnisation, quelques conseils aux victimes :

• Demandez aux services de police ou de gendarmerie une copie de votre procès-verbal d’audition et le triplicata d’accident qui contient les données sur les véhicules impliqués et le statut de chaque victime. Cela vous aidera à prouver votre situation au moment de l’accident, surtout si vous êtes une victime protégée en tant que non-conductrice, et à obtenir plus vite des provisions et l’organisation d’une expertise.

• Gardez soigneusement tous les justificatifs de vos dommages. Il s’agit notamment des pièces médicales à conserver en toute circonstance, mais aussi des factures et justificatifs de frais occasionnés par votre accident.

• Pour un accident aux conséquences plus mesurées, il est possible que votre assureur se charge directement de votre indemnisation (et non celui du véhicule responsable) selon la convention IRCA. La convention IRCA est un accord entre les compagnies d’assurances.

• Pour des blessures graves ou des préjudices importants, n’oubliez pas que les compagnies d’assurances sont soumises à des accords et ne sont pas des organismes caritatifs. Faire appel à un avocat spécialisé peut être indispensable pour défendre au mieux vos intérêts.

• Si le responsable de votre accident a pris la fuite ou n’est pas assuré, vous serez indemnisé par le Fonds de garantie des assurances obligatoires (FGAO). Une procédure avec le fonds de garantie d’assurances obligatoires peut vite se compliquer et l’intervention d’un avocat spécialisé peut être très utile.

• Pendant les expertises médicales, n’hésitez pas à vous faire accompagner par un médecin-conseil indépendant. L’expertise médicale est le moment crucial pour évaluer vos dommages. Le rapport d’expertise sera la base de l’évaluation de vos préjudices.

• Si vous n’êtes pas d’accord avec les conclusions du médecin-conseil de la compagnie d’assurances, vous pourrez toujours demander au Tribunal de désigner un expert judiciaire. Cela peut être nécessaire notamment en cas de handicap sévère ou de blessures graves.

Si vous êtes victime d’un accident survenu à l’étranger ou sur le territoire français mais causé par un véhicule étranger nous vous invitons à consulter notre article sur le sujet ici : L’indemnisation des victimes d’accidents de la circulation causé par un véhicule immatriculé à l’étranger.

Si vous êtes victime d’un accident causé par un véhicule non assuré ou par un auteur non identifié nous vous invitons à consulter notre article sur le sujet ici : Victime d’un accident de la route causé par un non assuré : comment être indemnisé ?

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